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Lundi 17 juin

11h30 - 13h : Atelier « Text mining / fouille de textes »

La mise en ligne massive des publications et le développement des formats électroniques permettant des recherches approfondies sur les textes ont progressivement transformé la production écrite des SHS en un ensemble de données, susceptibles d’investigations automatisées. La possibilité de procéder à une telle analyse ouvre de nouvelles opportunités scientifiques aux chercheurs, mais elle pose également un certain nombre de questions : quelle valorisation pour ces données et les métadonnées qui les accompagnent du point de vue de l’économie de l’édition ? Quel statut juridique pour ce type d’accès au texte ? Quelles nouvelles possibilités de recherches scientifiques et de recomposition du savoir ? Quelles conséquences sur le travail des éditeurs, en particulier de revues, qui savent que les travaux publiés sont saisis d’une manière plus fragmentée par les moteurs de recherche d’articles, et plus largement sur les modes d’écriture et d’élaboration de la connaissance ?

Cet atelier réunira Évelyne Broudoux, Alexandre Delanoë et Célia Zolynski.

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11h30 - 13h : Atelier « Éthique de la publication (intégrité, déontologie, plagiat, etc.) »

L’augmentation rapide de la quantité de publications dans le domaine des SHS et de leur mise en ligne a ouvert de nouvelles problématiques en matière d’éthique scientifique. Comme dans les sciences de la nature, la mise à disposition des données brutes de la recherche permet, en théorie, une vérification plus approfondie des résultats par la communauté scientifique, et les instruments de contrôle croisé des publications se sont développés (logiciels de repérage automatique du plagiat, forums de discussion des publications scientifiques, mouvements en faveur de la transparence des données comme les TOP guidelines). Cependant, les pratiques de plagiat sont considérablement facilitées par la mise en ligne, tandis que la pression à la publication rapide et l’abaissement de la barrière de la parution par le biais des outils d’autopublication peuvent parfois conduire à la détérioration de la qualité scientifique et formelle des travaux disponibles. La question de l’élaboration d’une éthique de la publication, partagée par les éditeurs, les auteurs et les lecteurs qui sont désormais plus souvent en situation active de retour sur ce qu’ils lisent et peuvent être mobilisés en tant que communauté à la fois savante, politique et économique, se pose d’une manière renouvelée.

Cet atelier réunira Michelle Bergadaà, Véronique Ginouvès et Matthieu Noucher.

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16h30 - 18h : Atelier « Le cadre légal et ses évolutions : politique nationale, politique européenne »

Après une rapide évolution technologique dans un cadre largement construit pour le droit d’auteur classique et l’édition papier, la législation est depuis quelques années en cours de transformation pour intégrer les effets de la révolution numérique sur la production des livres et des revues en SHS. Cette évolution se fait cependant de manière contrastée, en particulier entre un niveau législatif national qui diffère selon les pays, un niveau européen qui cherche à produire un système normatif cohérent, et un niveau mondial au sein duquel les questions de droit d’auteur et de droit à la propriété des contenus sont souvent remises en cause par les multinationales du numérique (GAFAM) qui se sont créées ou renforcées depuis les années 1990.

Depuis le lancement en 2002 de l’« Initiative de Budapest pour le libre accès à la recherche », en réaction aux tarifs excessifs des grands éditeurs scientifiques anglophones, la question de la transition vers l’open access a été au cœur des évolutions réglementaires et juridiques concernant l’édition scientifique en général, et celle de SHS en particulier : exigences du programme-cadre de recherche H2020 (maintenant Horizon Europe) ainsi que nouvelle directive sur le droit d’auteur en cours d’élaboration au niveau de l’Union européenne (avec les pressions accrues des GAFAM contre le droit d’auteur européen) ; adoption en France en octobre 2016 de la « loi pour une République numérique » (prévoyant notamment la faculté de dépôt rapide sur des archives ouvertes des articles scientifiques des chercheurs) ; lancement en juillet 2018 du « Plan pour la science ouverte » par le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation ; mise en œuvre du plan S par les financeurs de la recherche au niveau européen ; adoption dans de nombreux pays de différents dispositifs d’open access pour les revues, mais aussi pour les livres, etc.

Face à ce foisonnement, il est important de tenter d’établir un tableau cohérent des évolutions législatives et réglementaires dans le domaine éditorial, en particulier de l’équilibre entre les enjeux de la diffusion ouverte, ceux de la propriété intellectuelle et ceux des modèles économiques actuellement en compétition, en soulignant que la période actuelle paraît se caractériser par un déplacement des débats du cadre légal vers le cadre réglementaire, qui pourrait constituer le principal mode d’action de l’État dans les prochaines années, à travers un soutien prioritaire à l’open access ou aux licences Creative Commons, avec lesquels doivent désormais cohabiter les contrats de cession de droits.

Cet atelier réunira Isabelle Gras et Anne-Laure Stérin.

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16h30 - 18h : Atelier « Standards scientifiques et standardisation de la production éditoriale »

La relation entre les formes d’évaluation scientifique, qui produisent de nouveaux standards, les formes d’écriture pratiquées par les chercheurs et les attentes des éditeurs est une question majeure de la sociologie des pratiques éditoriales au sein des SHS. La position prise par l’article de revue, en particulier dans le monde anglophone, est corrélative d’une standardisation des modes de narration et de présentation des résultats, qui laisse peu de place à l’expression d’interventions non standards. De même, les attentes des grandes collections chez les éditeurs généralistes du secteur privé, elles-mêmes largement déterminées par le marché, façonnent également l’écriture scientifique de manière collective, si bien que l’on peut parfois aller jusqu’à parler d’effets de mode en SHS, touchant une discipline ou une thématique, avec un jeu de circulation entre les avancées de la recherche (qui ne sont pas épargnées par de tels effets de mode, y compris dans la mobilisation des financements) et les succès en librairie. Or ces enjeux, à part sous l’angle d’un traitement narrativiste relevant de la poétique des sciences humaines, ont été très peu éclairés par la recherche. La longueur des textes publiés, la place des notes par rapport au texte, le choix d’un langage plus ou moins codifié, sont autant de critères pourtant décisifs dans la construction de la production éditoriale au sein de nos disciplines. Les flux éditoriaux et leur gestion par des outils complexes modifient aussi les relations au sein d’une revue et dans la communauté scientifique qui l’entoure. Ces critères matériels interagissent fortement avec les questions méthodologiques et épistémologiques, mais aussi avec la perception des travaux en SHS par le grand public.

Cet atelier réunira Pauline Labey, Pierre-Carl Langlais, Charles-Henri Lavielle et Anne Rasmussen.

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Mardi 18 juin

11h30 - 13h : Atelier « Pratiques de lecture : librairies, bibliothèques, lecture en ligne »

Les transformations que cherchent à saisir les États généraux concernent également les pratiques de diffusion et de consommation des publications en SHS. En effet, les modifications profondes de l’écosystème éditorial sont directement liées à des transformations en aval de la chaîne de production. Le réseau des librairies, qui a longtemps joué un rôle clé dans la diffusion des SHS, aussi bien pour les livres que les revues, est non seulement fragilisé par la place nouvelle prise par les distributeurs en ligne comme Amazon, mais aussi, plus spécifiquement, par les mutations de l’écriture et des supports des SHS. De même, la réorientation des bibliothèques (qui ont dû faire face à l’augmentation exponentielle de la production de livres depuis trois décennies) vers des offres numériques au détriment des abonnements papier et d’une mise à disposition physique des ouvrages a également modifié le rapport entre les éditeurs et les lecteurs. Enfin, les pratiques de lecture en ligne, si elles font désormais l’objet de travaux de recherche, sont souvent mal connues alors que leur dynamique est un facteur décisif pour l’édition. Une confrontation entre des acteurs tels que les libraires et les bibliothécaires et des analystes du monde de la diffusion devrait permettre d’éclairer davantage la réalité concrète et actuelle du lectorat de SHS en langue française.

Cet atelier réunira Philippe Chevallier, Benoît Epron, Mariannig Le Béchec et Samuel Péricaud.

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11h30 - 13h : Atelier « Traductions et langues »

Durant la seconde moitié du XXe siècle, le secteur des SHS francophones a été marqué par une prédominance de la traduction sortante et une limitation assez forte de la traduction entrante. Depuis, la prise de conscience de l’évolution de la production mondiale des SHS a progressivement conduit à une augmentation des traductions entrantes. Dans le domaine des traductions sortantes, le bilan est contrasté. Ces dernières années, la cession des droits est en augmentation dans un secteur de plus en plus professionnalisé qui offre de nouvelles marges financières aux éditeurs. Toutefois, la traduction des monographies académiques recule, à la différence des essais plus généraux de SHS, sur la toile de fond d’une diminution de la présence des auteurs français dans les langues européennes, à commencer en anglais. Cette évolution n’est que le reflet d’une domination de plus en plus forte de l’anglais comme langue de communication scientifique, même si les SHS ne sont pas en cela encore comparables aux sciences de la nature et que les formes de publication locale dans une grande variété de langues continuent à fleurir.

Ainsi, la question des langues de publication est aujourd’hui centrale pour le milieu éditorial des SHS. Dans le secteur public des revues et chez certains petits éditeurs à vocation transnationale, on voit se multiplier des initiatives de traduction ou de publication directement en anglais depuis la France, tandis que le lectorat ciblé par les maisons d’édition privées est un lectorat francophone, ce qui induit une autre distorsion dans l’espace de diffusion du savoir. Se pose également la question de la place des traducteurs et traductrices, de leur formation, de leur statut économique et scientifique (à partir du moment où ils sont nombreux à avoir une formation en recherche) et de leur rémunération dans la chaîne économique de l’édition. Enfin, la question linguistique aiguise la réflexion sur les concepts des SHS, sur leur histoire propre liée à des traditions locales, et sur le problème de la reconnaissance de la traduction comme possible activité de recherche. Le bouleversement à l’œuvre dans l’écriture et les langues est donc un enjeu prioritaire pour évaluer la situation de l’édition en SHS.

Cet atelier réunira Daniel Henkel, Christopher Leichtnam, Anne Madelain et Olivier Mannoni.

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16h30 - 18h : Atelier « Professionnalisation des métiers éditoriaux et organisation du travail »

Durant l’essentiel du XXe siècle, les métiers de l’édition se sont appuyés sur des formations initiales dans le domaine des SHS, auxquelles s’ajoutait une formation technique par la pratique de ces métiers. Or le début des années 2000 a correspondu à un développement important des formations professionnalisantes universitaires et à un essor de l’offre de formation continue (par exemple sous l’égide du SNE avec l’Asfored), en parallèle du développement d’un réseau professionnel pour l’édition publique, le réseau Médici. Le métier d’éditeur ou d’éditrice, au centre de la chaîne de production, a connu en particulier un mouvement de professionnalisation très net. Cette évolution a été le résultat du développement intégré des outils de préparation éditoriale, mais aussi d’une intégration des tâches, y compris de la correction. L’édition en SHS est donc aujourd’hui étroitement liée à un groupe de travailleurs et de travailleuses spécialisés, dont le profil socioprofessionnel est en profonde transformation.

Cette évolution a des effets sur l’organisation du monde éditorial, en relation avec un mouvement de précarisation et de sous-traitance, dans un contexte de fragilisation économique. Elle produit parfois de nouvelles situations de tension intellectuelle et sociale entre un personnel formé aux techniques et technologies de l’édition au niveau du master en général, et un autre à vocation davantage scientifique qui assume la responsabilité éditoriale, tout en étant de moins en moins capable de comprendre le détail des contraintes techniques pesant sur la production. Se pose également la question de la signification même des termes de « maison d’édition », d’« éditeur scientifique » ou d’« éditeur professionnel » dans ce nouveau paysage, au sein duquel se dessinent de nouvelles formes de structuration comme les pôles éditoriaux ou les pépinières de revues. Il est nécessaire aujourd’hui de prendre la mesure de cette évolution qui touche la formation et les carrières de celles et ceux qui produisent matériellement les publications, et de ses relations avec les transformations juridiques, techniques et intellectuelles du domaine des SHS.

Cet atelier réunira Céline Barthonnat, Cédric Michon, Dominique Roux et Ingrid Saillard.

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16h30 - 18h : Atelier « Économie des revues »

Au sein de la redéfinition en cours d’une nouvelle économie de l’édition, les revues, vectrices traditionnelles de l’innovation scientifique depuis le XIXe siècle, occupent une place à part. Si la mise en ligne et le développement de l’évaluation individuelle leur ont donné une nouvelle position, l’effritement de leur base économique traditionnelle  les abonnements à l’édition papier  au profit d’une consommation désormais largement numérique et souvent gratuite, a dans le même temps transformé profondément leurs conditions de production. L’édition privée de revues scientifiques a évolué, conduisant parfois à un recul, parfois au contraire à une croissance et à une concentration des portefeuilles de revues, tandis que l’édition publique est confrontée à l’abondance de demandes de soutien, d’autant que le nombre de nouvelles revues numériques dès leur origine augmente. Au cœur de cette évolution, la question du travail de préparation éditoriale et celle de la diffusion des revues se posent : la dématérialisation et la croissance de l’open access n’ont pas diminué le besoin de préparation éditoriale, de sorte que le financement du travail éditorial par des postes d’éditeurs et d’éditrices demeure primordial.

C’est sans doute l’une des questions les plus urgentes pour le monde de l’édition en SHS, même si elle n’est pas toujours la plus visible : comment peut-on évaluer le transfert entre les ressources des abonnements, en diminution, et les revenus numériques, en augmentation ? Cette évolution pourra-t-elle être intégrée à un nouveau modèle économique, qu’il soit soutenu par le secteur privé ou qu’il fasse intervenir encore plus directement les institutions publiques, dans une perspective où l’édition devient non plus une activité externe de valorisation de la recherche, mais une fonctionnalité interne de la chaîne de production du savoir et, donc, un investissement scientifique à part entière ? Dans quelle mesure ces transformations conduisent-elles à une reformulation du rôle de l’édition publique et des presses universitaires par rapport au secteur privé ?

Cet atelier réunira Isabelle Boutoux, Thomas Parisot, Daniel Renoult et Charles Ruelle.

 

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